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Dans les rues de Ouagadougou, la capitale du Burkina Faso, ils sont environ 8 000 enfants sans-abris à vivre et survivre seuls. Souvent en rupture avec leur famille, ils sont les proies faciles de tous les abus : violence, drogue, délinquance… Le centre Taab Yinga tente de sauver ces jeunes en leur apportant un cadre sécurisé mais aussi un soutien psychologique et humain pour leur permettre de se réinsérer dans la société et dans leur famille.

 

 

Cours d’alphabétisation. ©D. N’Gatta

« Taab Yinga » signifie en Moré « Entraide Mutuelle ». Un nom qui correspond parfaitement à ce que propose le centre à ces enfants malmenés par la vie. Il accueille une vingtaine de jeunes, âgés de 10 à 18 ans dont 19 vivent au foyer. Tous évoluent dans une grande précarité sociale. Certains viennent des familles, d’autres sont repérés lors de maraudes des équipes du centre, tandis que d’autres sont orientés au centre via le SAMU sociale du Burkina Faso ou encore la Mairie Centrale de Ouagadougou. « Nous faisons nos maraudes dans plusieurs quartiers de la ville », explique une animatrice. Il est important pour l’équipe de rencontrer l’enfant dans son milieu de vie, de l’écouter et de le soigner sur place parfois. Ils leur proposent aussi de venir au centre pour se laver, laver leurs vêtements. Ces enfants ont le choix d’intégrer le foyer, en fonction de leur volonté de sortir de la rue car rien ne se fait par la contrainte mais par l’écoute. « L’accueil dans le centre de jour est l’une des activités qui durent toute l’année dans la mesure des places disponibles au centre ainsi que des ressources financières. Les enfants accueillis au centre de jour, en fonction de leur régularité et de leur désir de sortir de la rue, peuvent intégrer le foyer. Nous identifions les jeunes désireux de changer de vie », note l’association Taab Yinga dans son rapport 2020. Lors de ces maraudes, les éducateurs notent que bon nombre d’enfants sont sous l’emprise de stupéfiants. La première difficulté des éducateurs est de réapprendre aux enfants à vivre dans un cadre de vie régulier, contrairement à l’anarchie qui règne dans les rues. Il n’est pas simple pour eux de quitter la rue du jour au lendemain. Pour apaiser les conflits, l’équipe propose quotidiennement des espaces de paroles libres dans le cadre de partages appelés « causeries éducatives ».

Les jeunes ont la possibilité d’apprendre un métier grâce au centre Taab Yinga afin de les aider à se réintégrer dans la société. Ils suivent ainsi des cours d’alphabétisation et une formation professionnelle telle que la soudure, la menuiserie ou encore la couture. Grâce au réseau de l’association, ils peuvent réaliser des stages en entreprise.

 

« Nous sommes des ordures »

 

Au centre Taab Yinga, l’important est d’aider les jeunes se stabiliser mais aussi de recréer un lien avec les familles puis leur permettre de se réinsérer dans la société. Lorsque l’on parcourt les profils des enfants, un triste constat se fait sans appel : la plupart sont orphelins de père ou de mère et se retrouvent à la rue lorsque l’un des deux parents se remarient. Les parents sont accueillis les week-ends et certaines après-midi en cas de nécessité. Ils sont invités à venir chercher leurs enfants un week-end sur deux. « Cette démarche permet aux parents de garder le lien avec leurs enfants, d’être informés de leur évolution psychologique et professionnelle. Elle facilite également la réconciliation entre jeunes et familles. Le constat est que peu de parents respectent ce peu de devoir qui leur est demandé si bien qu’un jeune révolté d’être abandonné aux mains des acteurs travaillant au Centre a lancé un jour cette phrase pathétique : ‘’nous, nous sommes des ordures que l’on vient abandonner au Centre’’ », relate le centre, « Certains de ces parents ont, eux-mêmes, besoin d’accompagnement pour retrouver l’équilibre. Il serait fastidieux de relater dans ce rapport tous les actes réalisés et les efforts déployés au quotidien par les animateurs du Centre que sont les différents personnels en service de même que les difficultés financières pour un investissement qui permettent une auto prise en charge du Centre telle que souhaitée. Ceci pour signifier que le travail auprès des jeunes vulnérables demande beaucoup d’énergie tant physique qu’intellectuelle, de sacrifice. Il est éreintant mais très formateur ! »

 

Les jeunes peuvent suivre une formation professionnelle pour se réinsérer dans la société. ©D. N’Gatta