« Bâtissez le bonheur des autres. Demain aura votre visage. »

Par ces mots Raoul Follereau exhortait les jeunes à se mettre au service des exclus. Répondant à cet appel, les Guides et les Scouts d’Europe participent chaque année, depuis 1970, aux Journées mondiales des malades de la lèpre (JML). En juillet dernier, l’AGSE et la Fondation Raoul Follereau ont signé une convention consacrant ce partenariat de longue date. 

Interview croisée avec :
Claire Sot,
Responsable du service Bénévolat de la Fondation Raoul Follereau 
et Nicolas Maillard, Directeur des opérations et responsable de la communication de l’Association des Guides et Scouts d’Europe (AGSE)

Quelles valeurs partagent l’AGSE et la Fondation Raoul Follereau, qui donnent sens à leur partenariat  ?  

Claire Sot
La Fondation Raoul Follereau veut bâtir un monde sans lèpre et place l’être humain au cœur de ses projets. Nous partageons avec l’AGSE ce souci d’un monde plus juste et plus humain. L’attention portée aux personnes les plus vulnérables est vécue dans nos deux organisations. « Le fort protège le plus faible » dit la loi scoute. C’est aussi ce qu’incarne Raoul Follereau qui est allé vers les malades de la lèpre alors qu’ils étaient oubliés et rejetés du monde. Aujourd’hui, de nombreux soignants soutenus par la Fondation sont engagés auprès de ces malades encore trop souvent stigmatisés.

Au niveau du Bénévolat, notre mission c’est avant tout de faire grandir une chaîne de solidarité du coin de la rue au bout du monde, comme Raoul Follereau l’avait initié, et de créer des générations conscientes et actives dans la lutte contre la lèpre. Or rendre service fait partie de l’ADN des scouts.

Nicolas Maillard 
La principale valeur commune, c’est le service : la Fondation Raoul Follereau sert les malades de la lèpre, et dans la loi scoute il y a « le scout est fait pour servir et sauver son prochain ». Notre mission, c’est de former des jeunes prêts à servir et s’engager auprès de tout prochain, quel qu’il soit. C’est vraiment là qu’il y a un lien et, par cette convention, on rappelle le sens de la quête annuelle de la JML, on sensibilise à la cause portée par la FRF.

Une deuxième valeur commune serait : faire du bien sans faire trop de bruit, à l’image de Raoul Follereau. C’est ce qu’on essaie de transmettre à nos jeunes : la générosité, c’est-à-dire se bouger physiquement, mentalement pour servir et aider d’autres personnes, même si on ne les connait pas.

 

Quels objectifs les deux organisations partenaires se sont-elles donnés ?  

Nicolas Maillard 
Il y a d’abord le sujet de la sensibilisation : on veut éveiller nos jeunes à ce qui se passe encore aujourd’hui, dans différents pays dans lesquels la Fondation est active. Avec la lèpre, on est sur un sujet réel mais occulté et peu connu de nos jeunes. Il ne s’agit donc pas seulement de faire la quête pour la JML, mais de pouvoir organiser localement des actions de sensibilisation pendant la JML. Dans la promesse scoute, on promet de « s’engager toute notre vie dans le monde qui nous entoure » : le monde qui nous entoure, c’est aussi chacun de ces pays où la lèpre existe encore au XXIème siècle.

Et une autre partie nous intéresserait beaucoup, ce serait de pouvoir proposer à des aînés (17-19 ans) des actions d’aventure et de service dans les pays où la Fondation est active. Mais c’est encore à définir avec la Fondation.  

Claire Sot 
Au service Bénévolat, notre mission c’est de rendre visible la lèpre et de changer les regards sur les personnes qui sont touchées, sensibiliser à la lutte contre la lèpre et les autres maladies tropicales négligées cutanées. On vient faire entendre la voix des personnes exclues sur l’espace public. Et pour cela, on a besoin des jeunes. Si on ne vient pas leur parler de la lèpre, c’est une maladie qui va être complètement oubliée ! 

L’objectif à court terme avec l’AGSE, c’est la collecte de la Journée mondiale des malades de la lèpre (JML), en janvier prochain. À moyen terme, on va chercher à former les scouts et les guides, et leur donner les moyens d’élaborer des actions de sensibilisation. Concrètement, on peut imaginer des défis solidaires, des rencontres, des témoignages, etc. Il y a une urgence à sensibiliser pour que ces malades ne soient pas oubliés ! 

Sur le long terme, l’idée est de pouvoir compter sur les guides et les scouts comme ambassadeurs des malades, c’est de les faire entrer dans la chaîne de solidarité, du coin de la rue au bout du monde.

 

Vous l’avez dit, la notion de service est intrinsèque au scoutisme. Comment s’adresser aux jeunes, comment les inviter à s’engager ?

Nicolas Maillard
Nous ne connaissons pas de crise de l’engagement [au sein de l’AGSE] : beaucoup de jeunes viennent pour rendre ce qu’ils ont reçu enfants. Ils voient le sens de notre œuvre éducative et y mettent de leur personne, de manière 100% bénévole ! On a par ailleurs une explosion de demandes de jeunes de 17-19 ans qui découvrent le scoutisme et des valeurs qu’ils ne retrouvent pas ailleurs : le sens du concret, le sens du service, du caractère et de la vie en collectivité. Ils sont perdus dans le monde qu’on leur montre, et ils voient dans le scoutisme une expérience d’être davantage eux-mêmes.

Claire Sot :
Il y a ce message de Raoul Follereau qu’on peut transmettre aux jeunes d’aujourd’hui : « Vous êtes les bâtisseurs d’avenir » et j’ajouterais : le monde a besoin de vous.

L’idée, c’est que les jeunes puissent s’identifier à des jeunes de leur âge qui ne peuvent aller à l’école ou qui sont stigmatisés en raison de leurs séquelles. Je pense notamment à Gisèle, jeune fille de 15 ans vivant dans un village isolé, au Tchad, qui a été la figure de la JML 2025. En participant aux actions de bénévolat, les Guides et les Scouts d’Europe vont contribuer à donner voix aux sans-voix.

 

Auriez-vous un message à adresser à tous ces jeunes, Guides et Scouts d’Europe ?

Claire Sot :
Si vous, vous ne contribuez pas à la justice sociale, si vous ne mettez pas votre pierre à l’édifice, qui le fera ? continuez à mener ce combat ! Et transmettez aux plus jeunes : soyez des ambassadeurs de cette cause.

Nicolas Maillard :
Ce partenariat c’est l’occasion de découvrir un sujet un peu trop inconnu en France. Pour ceux qui sont en âge de vivre l’aventure, il n’y a rien de plus beau que d’être au service. Rien que des actions de sensibilisation, rien que participer à la quête de la JML, c’est donner du sens à ce que pourquoi on est scout, c’est-à-dire : servir et sauver son prochain et apprendre à être généreux. C’est une occasion de partir à l’aventure !

 

 

Photo – de gauche à droite : Nicolas Maillard, Directeur des opérations de l’AGSE ; Rémi Fourneraut, président de l’AGSE ; Oleg Ouss, président du Directoire de la Fondation Raoul Follereau ; Claire Sot, responsable du Bénévolat de la Fondation Raoul Follereau.